Chartreuse 1878-1903
La Chartreuse de 1878-1903 (Fourvoirie)
La famille Meunier, qui avait l'autorisation des Pères Chartreux de se servir du nom "Chartreuse" depuis 1842, fait la une de tous les journaux dans les années 1888-1889. Les Meunier sont à présent crédités comme étant les inventeurs officiels de la Chartreuse, puisqu'ils détiennent légalement la recette originale ainsi que le droit d'utiliser la marque. Cet état de fait complique la vie des moines. De plus, Henri Meunier (le petit-fils de Charles Meunier, à qui le Chartreux Dom Emmanuel Antoine Nivière avait offert la recette de l'élixir et de la liqueur verte en 1813, pour le remercier de son aide durant la Terreur) s'est installé au Royaume-Uni et commence à exporter sa Chartreuse avec succès.
C’est ainsi qu'en 1894, les Chartreux s’organisent pour racheter entièrement la marque et bénéficier de droits exclusifs pour son utilisation. Pendant ce temps, Henri Meunier fait tout pour créer la confusion : il change la forme de ses bouteilles, y appose le nom "Chartreuse", reprend les mêmes étiquettes que les moines, se sert des mêmes bouchons… Dom Grézier défend vaillamment ses droits et finit par avoir gain de cause. La famille Meunier n'est pas jugée comme responsable de contrefaçon puisqu'elle détient la recette originale, mais elle est condamnée pour avoir imité le produit des Chartreux. Craignant que cela ne soit suffisant, les Pères offrent 150 000 francs aux Meunier afin qu'ils abandonnent totalement la marque "Chartreuse" ainsi que toute utilisation de la recette originale confiée à Charles Meunier. Ainsi, en 1897, l'ordre des Chartreux devient enfin le seul et unique propriétaire de sa marque.
Une grande victoire pour Dom Grézier et ses confrères, mais de mauvaises nouvelles ne tardent pas à tomber. La loi de séparation de l'Église et l'État entre en vigueur en juillet 1901. Son article 18 stipule que toute congrégation religieuse non autorisée verra ses biens confisqués. Les politiciens français de l'époque et leurs amis industriels voient là une parfaite occasion pour s'emparer de la Chartreuse, qui fait alors un chiffre d'affaires annuel de plusieurs millions de francs. Craignant le pire, les Chartreux prennent les devants et préparent leur fuite vers l'Espagne où ils ont déjà créé une Union Agricola (une société d'exploitation de liqueur).
Et le pire arrive en effet : en juin 1902, Émile Combes est élu Président du Conseil des Ministres et, dès le mois de décembre, il commence la destruction pure et simple du catholicisme en France. Les Chartreux, qui utilisent pourtant la grosse majorité de leurs revenus pour développer écoles, hôpitaux et autres services d'utilité publique, sont à présent accusés par Combes d'encourager le vice et le paupérisme. L'élu s’appuie sur un livre écrit par l'ancien médecin des Chartreux, André Pascal, qui cherchait à se venger de l'ordre. Malgré ses efforts, Dom Michel Baglin (révérend père de l'époque) ne parvient pas à faire entendre raison aux hommes politiques, aveuglés par l'appât du gain.
En mars 1903, le Parlement vote pour l'éviction définitive des Chartreux et la saisie de tous leurs biens. Dom Valéry Rey, l'ancien procureur de la Grande Chartreuse déclare que jamais les moines ne céderont leur marque. En avril 1903, la liquidation du monastère commence toutefois, menée par Henry Lecouturier. Il dresse l'inventaire des biens que possèdent les Pères et se prépare à les revendre au nom de l'État français. Chassés à contrecœur par la police, les moines quittent leur foyer et prennent le bateau, direction l'Italie et l'Espagne. Avant de partir, ils prennent soin d'emporter leur matériel de production et de brûler tous les stocks de plantes restants. Lecouturier se retrouve sans rien.
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